Rodenbach

La Jeunesse blanche, 1886


L’Eau qui parle


 
Dites, avez-vous remarqué,
Vous les amants du Soir moroses,
Quand vous allez, le long du quai,
Pleurant l’exil des soleils roses,
 
Quand vous allez par les temps gris,
Vous les songeurs, les taciturnes,
Ouvrir un peu vos yeux aigris
À des paysages nocturnes,
 
Quand, accoudés aux parapets,
La bise, si peu qu’on la sente,
Vous rend du rêve et de la paix
Par sa douceur rafraîchissante,
 
Avez-vous vu, quand sur les ponts
Debout dans leur orgueil de pierre
Vous entendez à petits bonds
Chevaucher l’eau de la rivière,
 
Dites, avez-vous remarqué
Combien l’eau se plaint et frissonne
Et demande aux parois du quai
Pourquoi le granit l’emprisonne.
 
C’est vrai qu’avec des soins pieux
La nuit, comme au cou d’une amante,
Met ses bijoux silencieux
Sur cette eau qu’un regret tourmente,
 
Les beaux bijoux des astres d’or,
Mais ce luxe du ciel, qu’importe !
Et la rivière pleure encore
Parce qu’un sort fatal l’emporte,
 
Et qu’elle fuit à tout moment,
Contrainte et brisée en des marches
Promptes inexorablement,
Malgré l’effort des grandes arches !
 
Et toute seule dans son lit
L’eau semble amoureuse et s’étire
Sous la lune qui l’appâlit,
Et, comme une femme, elle attire.
 
Mais elle veut de fiers amants !
Elle a des paroles mouillées
Et chuchote, avec des serments,
Qu’ils s’en iront sous les feuillées.
 
Qu’ils s’en iront au bon soleil
Chercher au fond de la campagne
Un pacifique, un long sommeil
Qu’un rêve de fleurs accompagne !...
 
Et parfois des poètes doux
Que la voix de l’eau triste appelle,
Escaladent les garde-fous
Pour aller dormir avec elle.
 
Puisque personne n’a compris
Combien leur Âme est grande et fière,
Ils offriront leurs yeux flétris
Aux baisers froids de la Rivière !
 

Commentaire (s)
Votre commentaire :
Nom : *
eMail : * *
Site Web :
Commentaire * :
pèRE des miséRablEs : *
* Information requise.   * Cette adresse ne sera pas publiée.
 


Mon florilège

(Tоuriste)

(Les textes et les auteurs que vous aurez notés apparaîtront dans cette zone.)

Compte lecteur

Se connecter

Créer un compte

Agora

Évаluations récеntes
☆ ☆ ☆ ☆ ☆

Αssоuсу : «Ρоurquоi dоnс, Sехе аu tеint dе rоsе...»

Viоn Dаlibrау : «Αimе, si tu lе vеuх, је nе l’еmpêсhе pаs...»

Βоurgеt : Lа Rоmаnсе d’Αriеl

Rоussеаu : Lе Rоssignоl еt lа Grеnоuillе

Αpоllinаirе : Lе Drоmаdаirе

Соignаrd : «Οbsсurе nuit, lаissе tоn nоir mаntеаu...»

Lаfоrguе : Βоufféе dе printеmps

Τоulеt : «Si vivrе еst un dеvоir...»

Ρéguу : Ρrésеntаtiоn dе lа Βеаuсе à Νоtrе-Dаmе dе Сhаrtrеs

☆ ☆ ☆ ☆

Vеrlаinе : L’Αubеrgе

Vеrlаinе : À Hоrаtiо

Соrnеillе : Sоnnеt : «Dеuх sоnnеts pаrtаgеnt lа villе...»

Fоurеst : Sаrdinеs à l’huilе

Sullу Ρrudhоmmе : Lеs Сhаînеs

Ρоnсhоn : Lе Gigоt

Cоmmеntaires récеnts

De Сосhоnfuсius sur Τаblе dе Sаgеssе (Sеgаlеn)

De Сосhоnfuсius sur Lе Vоl nосturnе (Sаint-Αmаnt)

De Сосhоnfuсius sur Εхtаsе (Αubigné)

De Ιоhаnnеs sur Ρrièrе dе соnfidеnсе (Ρéguу)

De Сurаrе- sur Lеs Fеuillеs mоrtеs (Gоurmоnt)

De Lilith sur Vеrlаinе

De Μоntеrrоsо sur Lа Μоuсhе (Αpоllinаirе)

De Jаdis sur Саrоlо Quintо impеrаntе (Hеrеdiа)

De Сurаrе- sur Sоnnеt : «Un livrе n’аurаit pаs suffi...» (Ρrivаt d'Αnglеmоnt)

De Τrуphоn Τоurnеsоl sur À unе mуstériеusе (Rоllinаt)

De Сurаrе- sur L’Αngе (Lоuÿs)

De Αlbаtrосе sur «Dоuсе plаgе оù nаquit mоn âmе...» (Τоulеt)

De Gеf sur À Μ. Α. Τ. : «Αinsi, mоn сhеr аmi, vоus аllеz dоnс pаrtir !...» (Μussеt)

De Gеf sur Villеs : «Се sоnt dеs villеs !...» (Rimbаud)

De Jаdis sur Τаblеаu (Сrоs)

De Βibоsаurе sur À Αlf. Τ. : «Qu’il еst dоuх d’êtrе аu mоndе, еt quеl biеn quе lа viе !...» (Μussеt)

De Βоurg sur «Lоngtеmps si ј’аi dеmеuré sеul...» (Τоulеt)

De Jаdis sur Épigrаmmе d’аmоur sur sоn nоm (Αubеspinе)

De Ιsis Μusе sur Lа grоssе dаmе сhаntе... (Ρеllеrin)

De Dаmе dе flаmmе sur Сhаnsоn dе lа mélаnсоliе (Fоrt)

Plus de commentaires...

Flux RSS...

Ce site

Présеntаtion

Acсuеil

À prоpos

Cоntact

Signaler une errеur

Un pеtit mоt ?

Sоutien

Fаirе un dоn

Librairiе pоétique en lignе