Germain Nouveau

Valentines, 1887


La Maxime


 
La Rochefoucauld dit, Madame,
Qu’on ne doit pas parler de soi,
Ni ?.. ni ?.. de ?.. de ?.. sa ?.. sa ?.. sa femme.
Alors, ma conduite est infâme,
Voyez, je ne fais que ça, moi.
 
Je me moque de sa maxime.
Comme un fœtus dans un bocal,
J’enferme mon « moi » dans ma rime,
Ce bon « moi » dont me fait un crime
Le sévère Blaise Pascal.
 
Or, ce ne serait rien encore,
On excuse un... maudit travers ;
Mais j’enferme Toi que j’adore
Sur l’autel que mon souffle dore
Au Temple bâti par mes vers ;
 
Sous les plafonds de mon Poëme,
Sur mes tapis égyptiens,
Dans des flots d’encens, moi qui T’aime,
Je me couche auprès de Toi-même
Comme auprès du Sphinx des Anciens ;
 
Tel qu’un Faust prenant pour fétiche
L’un des coins brodés de tes bas,
Je Te suis dans chaque hémistiche
Où Tu bondis comme une biche,
La Biche-Femme des Sabbats ;
 
Comme pour la Sibylle à Cumes,
Mon quatrain Te sert de trépied,
Où, dans un vacarme d’enclumes,
Je m’abattrai, couvert d’écumes,
Pour baiser le bout de ton pied ;
 
À chaque endroit de la césure,
D’un bout de rythme à l’autre bout,
Tu règnes avec grâce et sûre
De remplir toute la mesure,
Assise, couchée, ou debout.
 
Eh, bien ! j’ai tort, je le confesse :
On doit, jaloux de sa maison,
N’en parler pas plus qu’à la messe ;
Maxime pleine de sagesse !
J’ai tort, sans doute... et j’ai raison.
 
Si ma raison est peu touchante,
C’est que mon tort n’est qu’apparent :
Je ne parle pas, moi, je chante ;
Comme aux jours d’Orphée ou du Dante,
Je chante, c’est bien différent.
 
Je ne parle pas, moi, Madame.
Vous voyez que je n’ai pas tort,
Je ne parle pas de ma femme,
Je la chante et je clame, clame,
Je clame haut, sans crier fort.
 
Je clame et vous chante à voix haute.
Qu’il plaise aux cœurs de m’épier,
Lequel pourra me prendre en faute ?
Je ne compte pas sans mon hôte,
J’écris « ne vends » sur ce papier.
 
J’écris à peine, je crayonne.
Je le répète encor plus haut,
Je chante et votre Âme rayonne.
Comme les lyres, je résonne,
Oui... d’après La Rochefoucauld.
 
Ah ! Monsieur !.. le duc que vous êtes,
Dont la France peut se vanter,
Fait très bien tout ce que vous faites ;
Il dit aux femmes des poëtes:
« Libre aux vôtres de vous chanter !
 
Dès qu’il ne s’agit plus de prose,
Qu’il ne s’agit plus des humains,
Au Mont où croît le Laurier-Rose,
Qu’on chante l’une ou l’autre chose,
Pour moi, je m’en lave les mains. »
 
Donc, sans épater les usages,
Je ferai, Madame, sur Vous
Dix volumes de six cents pages,
Que je destine... pas aux sages,
Tous moins amoureux que les fous.
 
Pour terminer, une remarque,
(Si j’ose descendre à ce ton,
Madame), après, je me rembarque,
Et je vais relire Plutarque
Dans le quartier du Panthéon :
 
Sans la poésie et sa flamme,
(Que Vous avez, bien entendu)
Aucun mortel, je le proclame,
N’aurait jamais connu votre âme,
Rose du Paradis Perdu ;
 
Oui, personne, dans les Deux-Mondes,
N’aurait jamais rien su de Toi.
Sans ces... marionnettes rondes,
Les Vers bruns et les Rimes blondes,
Mais, oui, Madame, excepté moi.
 

Commentaire (s)
Votre commentaire :
Nom : *
eMail : * *
Site Web :
Commentaire * :
pèRE des miséRablEs : *
* Information requise.   * Cette adresse ne sera pas publiée.
 


Mon florilège

(Tоuriste)

(Les textes et les auteurs que vous aurez notés apparaîtront dans cette zone.)

Compte lecteur

Se connecter

Créer un compte

Agora

Évаluations récеntes
☆ ☆ ☆ ☆ ☆

Lа Fоntаinе : Lа Сigаlе еt lа Fоurmi

Βоilеаu : Sаtirе ΙΙ : «Rаrе еt fаmеuх еsprit, dоnt lа fеrtilе vеinе...»

Τоulеt : «Τrоttоir dе l’Élуsé’-Ρаlасе...»

Τоulеt : «Qui dirа, dаns l’оmbrе du bоis...»

Dеsbоrdеs-Vаlmоrе : Lе Ρuits dе Νоtrе Dаmе à Dоuаi

Сеndrаrs : L’Οisеаu blеu

Lесоntе dе Lislе : Αuх mоdеrnеs

Νоuvеаu : Μusulmаnеs

Τоulеt : Lа prеmièrе fоis.

Τоulеt : «Dоuсе plаgе оù nаquit mоn âmе...»

☆ ☆ ☆ ☆

Hugо : Fаblе оu Histоirе

Gоurmоnt : Lеs Fеuillеs mоrtеs

Hugо : «L’hirоndеllе аu printеmps сhеrсhе lеs viеillеs tоurs...»

Rоnsаrd : L.Μ.F.

Ρéguу : Ρаris dоublе gаlèrе

Klingsоr : Αu јаrdin dе mа tаntе

Νоuvеаu : Αvаnt-prоpоs

Vеrlаinе : Βаllаdе à prоpоs dе dеuх Οrmеаuх qu’il аvаit

Cоmmеntaires récеnts

De Сосhоnfuсius sur L’Αbrеuvоir (Αutrаn)

De Сосhоnfuсius sur Lе Νаufrаgé (Hеrеdiа)

De Сосhоnfuсius sur Lеs Μоntrеurs (Lоrrаin)

De Сurаrе- sur «À bеаuсоup dе dаngеr еst suјеttе lа flеur...» (Сhаssignеt)

De Сhristiаn sur Lа Сhаpеllе аbаndоnnéе (Fоrt)

De Huаliаn sur Lа prеmièrе fоis. (Τоulеt)

De Сurаrе- sur «Μоn insоmniе а vu nаîtrе lеs сlаrtés grisеs...» (Gаrnеаu)

De Сurаrе- sur Lе Rоi dе Τhulé (Νеrvаl)

De Βеrgаud Α sur Lеs Gеnêts (Fаbié)

De Jаdis sur «Τоut n’еst plеin iсi-bаs quе dе vаinе аppаrеnсе...» (Vаlléе dеs Βаrrеаuх)

De Ιоhаnnеs sur Ρrièrе dе соnfidеnсе (Ρéguу)

De Lilith sur Vеrlаinе

De Μоntеrrоsо sur Lа Μоuсhе (Αpоllinаirе)

De Jаdis sur Саrоlо Quintо impеrаntе (Hеrеdiа)

De Сhristiаn sur Sоnnеt : «Un livrе n’аurаit pаs suffi...» (Ρrivаt d'Αnglеmоnt)

De Βib lа bаlеinе sur À unе mуstériеusе (Rоllinаt)

De Αlbаtrосе sur «Dоuсе plаgе оù nаquit mоn âmе...» (Τоulеt)

De Gеf sur À Μ. Α. Τ. : «Αinsi, mоn сhеr аmi, vоus аllеz dоnс pаrtir !...» (Μussеt)

De Gеf sur Villеs : «Се sоnt dеs villеs !...» (Rimbаud)

De Jаdis sur Τаblеаu (Сrоs)

De Βibоsаurе sur À Αlf. Τ. : «Qu’il еst dоuх d’êtrе аu mоndе, еt quеl biеn quе lа viе !...» (Μussеt)

Plus de commentaires...

Flux RSS...

Ce site

Présеntаtion

Acсuеil

À prоpos

Cоntact

Signaler une errеur

Un pеtit mоt ?

Sоutien

Fаirе un dоn

Librairiе pоétique en lignе