Claude de Malleville


Élégie


 
Philis, quitte pour moi cette humeur trop farouche,
Flatte mes passions, approche-moi ta bouche,
Et du plus doux baiser que l’amour puisse offrir,
Apaise le tourment que tu me fais souffrir.
Ah ! mon Dieu, je le sens et mon âme embrasée
Reçoit en ce baiser la céleste rosée !
Philis, cette liqueur que tu me fais goûter,
D’un charme non-pareil vient mon cœur enchanter.
C’est l’unique aliment des âmes bienheureuses,
Le remède fatal des flammes amoureuses,
Le nectar que Vénus donne à son favori
Et le lait dont Amour comme enfant est nourri.
Ô baiser, pour chanter les grâces que vous faites,
Il me faut un langage aussi doux que vous êtes.
Il faut que mon discours ait d’aussi vives fleurs
Que celles dont sa lèvre emprunte les couleurs,
Que le miel que sa bouche en la mienne distille,
Et que même son feu passe jusqu’à mon style.
Et certes le jasmin, les roses et l’encens
N’ont rien de comparable à l’odeur que je sens
Alors que le doux air qui sort de son haleine
Évente les ardeurs de ma cuisante peine.
Tout ce qu’ont les zéphirs de plus délicieux,
Tout ce que l’Arabie a de plus précieux
Et tout ce que l’Olympe en ses pompes suprêmes
Offre de plus exquis aux bouches des dieux mêmes,
Ce baiser me le donne, et ses charmes sont tels
Que je ne me tiens plus du nombre des mortels.
La liqueur que je goûte est le jus de cette herbe
Qui d’un simple pêcheur fit un dieu si superbe,
Et qui, le dépouillant de toute impureté,
Le combla des douceurs de l’immortalité.
Ô chef-d’œuvre du ciel ! ô sujet de ma joie !
En ce baiser humide où mon âme se noie,
Il semble que ta langue avecque ses appas
Demande sans parler si je ne t’aime pas.
Oui, je t’aime, Philis, et d’une amour si forte
Qu’à tout autre désir mon cœur ferme la porte.
C’est en tes seules mains que j’engage ma foi.
Je ne reconnais point de puissance que toi
Et ne veux consacrer mes travaux et mes veilles
Qu’à l’immortel honneur de tes rares merveilles.
Mais veux-tu rallumer par un second baiser
L’ardeur que le premier a tâché d’apaiser,
Et par mille soupirs qui ramènent ma flamme
Veux-tu faire un brasier au milieu de mon âme ?
Veux-tu me consumer dans tes embrasements
Et suspendre ma vie en des ravissements ?
Ô dieux, qu’en tes faveurs je t’éprouve cruelle !
Que ce remède est doux, mais qu’il est infidèle !
Que ta compassion a pour moi de rigueur
Et que ta douceur même est amère à mon cœur !
Philis, reprends pour moi cette humeur si farouche ;
Ne flatte point mes vœux, n’approche point ta bouche,
Et du plus doux baiser que l’amour puisse offrir,
N’irrite point le mal que tu me fais souffrir.
 



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