Assieds-toi là, Guyon, et me dis des nouvelles,
Nous nous sommes assez embrassés et chéris,
Que dit-on à la cour, que fait-on à Paris ?
Quels seigneurs y voit-on, et quelles damoiselles ?
Verrons-nous point de fin à ces guerres cruelles ?
Le froment et le vin sont-ils point enchéris ?
Et parmi tant de maux ne voit-on point péris
Tant d’emprunts, de taillons, d’impôts et de gabelles ?
As-tu point apporté quelque livre nouveau ?
As-tu point vu Ronsard, ou Pascal, ou Belleau ?
Que dit-on ? que fait-on ? Dis-moi, je te demande :
Le Jeûneur est-il point de parler dispensé ?
Le bâtiment du Louvre est-il fort avancé ?
Que dit-on au palais, et que fait la Normande ?
Exhibant sa blancheur à la saison nouvelle,
Il couve du regard le terroir qu’il chérit ;
Car ce n’est nullement un cygne de Paris,
Mais du plus bel étang, celui des demoiselles.
Envers cet emplumé, la vie n’est pas cruelle,
Il s’abreuve au ruisseau qui jamais ne tarit,
Puis il pêche la carpe, et point ne dépérit ;
Ce n’est pas un bestiau qui mange à la gamelle.
Il remercie le ciel à chaque jour nouveau,
La douceur de la brise et la fraîcheur de l’eau,
Bien satisfait d’avoir ce que son coeur demande.
Vivre comme cela, ne jamais trop penser,
Laisser les jours s’enfuir et les poissons danser,
C’est ce que le bon sens du cygne recommande.