Max Jacob

Le Laboratoire central, 1921


Établissement d’une communauté au Brésil


 
On fut reçu par la fougère et l’ananas
L’antilope craintif sous l’ipécacuanha.
Le moine enlumineur quitta son aquarelle
Et le vaisseau n’avait pas replié son aile
Que cent abris légers fleurissaient la forêt.
Les nonnes labouraient. L’une d’elles pleurait
Trouvant dans une lettre un sujet de chagrin.
Un moine intempérant s’enivrait de raisin
Et l’on priait pour le pardon de ce péché.
On cueillait des poisons à la cime des branches
Et les moines vanniers tressaient des urnes blanches.
Un forçat évadé qui vivait de la chasse
Fut guéri de ses plaies et touché de la grâce :
Devenu saint, de tous les autres adoré,
Il obligeait les fauves à leur lécher les pieds.
Et les oiseaux du ciel, les bêtes de la terre
Leur apportaient à tous les objets nécessaires.
Un jour on eut un orgue au creux des murs crépis
Des troupeaux de moutons qui mordaient les épis.
Un moine est bourrelier, l’autre est distillateur ;
Le dimanche après vêpre on herborise en chœur.
 
Saluez le manguier et bénissez la mangue
La flûte du crapaud vous parle dans sa langue
Les autels sont parés de fleurs vraiment étranges
Leurs parfums attiraient le sourire des anges,
Des Sylphes, des esprits blottis dans la forêt
Autour des murs carrés de la communauté.
Or voici qu’un matin quand l’Aurore saignante
Fit la nuée plus pure et plus fraîche la plante
La forêt où la vigne au cèdre s’unissait,
Parut avoir la teigne. Un nègre paraissait
Puis deux, puis cent, puis mille et l’herbe en était teinte
Et le Saint qui pouvait dompter les animaux
Ne put rien sur ces gens qui furent ses bourreaux.
La tête du couvent roula dans l’herbe verte
Et des moines détruits la place fut déserte
Sans que rien dans l’azur ne frémît de la mort.
 
C’est ainsi que vêtu d’innocence et d’amour
J’avançais en traçant mon travail chaque jour
Priant Dieu et croyant à la beauté des choses
Mais le rire cruel, les soucis qu’on m’impose
L’argent et l’opinion, la bêtise d’autrui
Ont fait de moi le dur bourgeois qui signe ici.
 

Commentaire (s)
Déposé par Cochonfucius le 4 janvier 2013 à 16h27

Je m’étais réfugié, encore adolescent,
Dans la cellule tiède, au coeur du monastère.
Peu sévère était l’Ordre et nullement austère,
Ce que nous apprenions était intéressant.

Puis, nous faisions partie du groupe des puissants,
Pour nous les paysans faisaient vivre leur terre,
Pour nous les commerçants ont armé leurs galères,
Facile de payer, rien qu’en les bénissant.

Maintenant je suis vieux, dévasté par le doute,
La voie que j’ai suivie, est-ce une fausse route ?
J’inscris cette question sur mes longs parchemins.

J’inscris cette question qui devient un poème,
Si cette vie sur terre est faite pour qu’on aime,
Aimer la poésie est aussi un chemin.

[Lien vers ce commentaire]

Déposé par Cochonfucius le 13 décembre 2018 à 20h44

Saint Bardamu
----------

Badamu fut ascète, en tant qu’adolescent ;
Il avait pour amis les gens du monastère
Et plus que chacun d’eux il se montrait austère,
Ce que ces frères-là trouvaient intéressant.

Il n’a jamais choisi un protecteur puissant,
Il est toujours resté un ami de la Terre ;
Personne, de son fait, ne fut mis en galère,
Et je vois bien des gens qui le vont bénissant.

Jamais son bel esprit n’entretint de grands doutes,
Libre fut son allure et droite fut sa route ;
Du diable, il n’a jamais signé le parchemin.

Bardamu, je le crois, méritait ce poème,
Car c’est un personnage,  un saint comme on les aime
Et dont on est heureux de croiser le chemin.

[Lien vers ce commentaire]

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