Maurice Donnay

Contes, fantaisies, poésies, théâtre de Maurice Donnay, 1911


Printemps [ou Sagesse]


 
Te voilà, Printemps, vieux jeune homme,
Avec tes vertes frondaisons
Et le drap vert de tes gazons.
Ah ! tu n’es pas très neuf, en somme.
 
Et, pourtant, dès que tu parais,
Les bruns garçons, les filles blondes
Autour de toi dansent des rondes
Comme des mouches dans les rais
 
Du soleil ! Ohé ! les poètes :
Amours, beaux jours, chansons, pinsons,
Aveux, doux vœux, frissons, buissons !
Joli mois de Mai, tu m’embêtes !
 
Aubes claires de rose thé,
Crépuscules d’héliotrope :
Tout cela me rend misanthrope,
Car je n’ai plus, en vérité,
 
L’âge des emballements roses,
Quand je croyais que le destin
Me servirait chaque matin
Une princesse avec des roses
 
Autour, dans un rare décor
Où des esclaves accoudées
Rêvent parmi des orchidées ;
L’âge où je n’avais pas encor
 
Brûlé ma dernière cartouche,
Quand ma maîtresses joliment
Me grondait d’être trop gourmand
Et toujours porté sur sa bouche...
 
Et, malgré ton éclat, Printemps,
Et les serments des amoureuses,
Je sens les angoisses peureuses
Du deuil automnal et du temps...
 
Oui, tous nos bonheurs, par jonchées
Avec les rameaux arrachés
Sont lamentablement couchés
Sur les pelouses desséchées.
 
Des hommes, beaux comme des dieux,
Emmènent à leurs bras des femmes
Qui sont belles comme les femmes !
Toutes et tous ont dans leurs yeux
 
Des regards longs comme des lances !
Ils passent devant ma maison ;
Ils me disent : « Viens-tu ? » Mais on
Ne me la fait plus aux troublances.
 
Vous pouvez me tendre la main,
Non, je ne serai pas le vôtre ;
Dans ma sagesse je me vautre ;
Passez, passez votre chemin ;
 
Et le cerveau bleuté de rêves,
Allez adorner de lilas
Le corsage des Dalilas
Dont les amours, comme eux, sont brèves.
 
Malgré mon amour des lointains,
En vain Madame Chrysanthème
Viendrait me murmurer : « Je t’aime »,
Car, sans baiser ses ongles teints,
 
Je la renverrais éplorée ;
Et si la Reine de Saba
Par quelque biblique sabbat
Me montrait la forêt sacrée...
 
Je la dédaignerais aussi.
Non, je ne crois plus que l’on m’aime :
Donc à quoi bon souffrir ? Et même
La blonde au corsage aminci
 
Qui vit, sans que je la connaisse,
Celle dont j’ai rêvé longtemps,
L’Inconnue, un soir de Printemps
Peut venir, claire en sa jeunesse :
 
Pour montrer quel homme je suis,
Quel homme je veux toujours être,
Qu’elle passe sous ma fenêtre !
Je prends mon chapeau, je la suis.
 

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