(collaborations) ***


Profession de foi


 
J’aimerais mieux, je crois, manger de la morue,
Du karis à l’indienne, ou de la viande crue,
Et le tout chez Martin, place du Châtelet,
D’où je sors ; j’aimerais mieux, même, s’il fallait,
Travailler à cent sous la colonne au Corsaire,
Ou bien au Figaro, comme un clerc de notaire ;
Ou bien dans la Revue, à raison de cent francs
La feuille in-octavo, petit-romain, sur grand
Papier, — ou dans la Mode, ou le Globe ou l’Artiste,
Pour rien, — que de m’entendre appeler Philippiste,
Républicain, Carliste, Henriquiste, — Chrétien,
Païen, Mahométan ou Saint-Simonien,
Blanc ou noir, tricolore, ou gris, ou vert, ou rose ;
Enfin quoi que ce soit qui croie à quelque chose.
 
C’est qu’il faut être aussi bête à manger du pain,
Rentier, homme du jour et non du lendemain,
Garde national, souscripteur, ou poète,
Ou tout autre animal à deux pieds et sans tête,
Pour ne pas réfléchir qu’il n’est au monde rien
Qui vaille seulement les quatre fers d’un chien ;
Que la société n’est qu’un marais fétide,
Dont le fond sans nul doute est seul pur et limpide,
Mais où ce qui se voit de plus sale, de plus
Vénéneux et puant, va toujours par-dessus :
Et c’est une pitié, c’est un vrai fouillis d’herbes
Jaunes, de roseaux secs épanouis en gerbes,
Troncs pourris, champignons fendus et verdissants,
Fange verte, écumeuse et grouillante d’insectes,
De crapauds et de vers, qui de rides infectes
Le sillonnent, le tout parsemé d’animaux
Noyés, et dont le ventre apparaît noir et gros.
Que sais-je encore ?... Il vient de ces moments de crise
Où le marais se gonfle et s’agite et se brise ;
Le fond vient par-dessus, clair et battant les bords
Pour creuser une issue et s’épandre au dehors.
Il se fait étang, lac, torrent. — Puis tout se calme
Et redevient marais ; la fin en général me
Paraît toujours la même, et la nature aussi
Des choses montre bien qu’il en doit être ainsi.
 
Cette perception m’est seulement venue
Depuis sept à huit mois, que j’ai vu toute nue
L’allure des partis, — et sur cet autre point
Des croyances, que j’ai connu qu’il n’en est point
De bonne, ni n’en fut ; — ce que m’a la logique
Des Saint-Simoniens démontré sans réplique,
Et j’y comprends la leur. — Donc, comme j’ai fort bien
Dit plus haut, maintenant, je ne crois plus à rien,
Hormis peut-être à moi ; — c’est bien triste ! et, sans doute,
En venir à ce point est chose qui me coûte ;
J’ai fait ce que j’ai pu, pour qu’errant au hasard
Mon âme autour de moi s’attachât quelque part,
Mais comme la colombe hors de l’arche envoyée,
Elle m’est revenue à chaque fois mouillée,
Traînant l’aile, sentant ses forces s’épuiser,
Et n’ayant pu trouver au monde où se poser !
 

M. Personne
[Gérard de Nerval et/ou Théophile Gautier]

Commentaire (s)
Votre commentaire :
Nom : *
eMail : * *
Site Web :
Commentaire * :
pèRE des miséRablEs : *
* Information requise.   * Cette adresse ne sera pas publiée.
 


Mon florilège

(Tоuriste)

(Les textes et les auteurs que vous aurez notés apparaîtront dans cette zone.)

Compte lecteur

Se connecter

Créer un compte

Agora

Évаluations récеntes
☆ ☆ ☆ ☆ ☆

Βаnvillе : À Αdоlphе Gаïffе

Du Ρеrrоn : «Αu bоrd tristеmеnt dоuх dеs еаuх...»

Βlаisе Сеndrаrs

Rоnsаrd : Dе l’Élесtiоn dе sоn Sépulсrе

Νuуsеmеnt : «Lе vаutоur аffаmé qui du viеil Ρrоméthéе...»

Lа Сеppèdе : «Сеpеndаnt lе sоlеil fоurnissаnt sа јоurnéе...»

Τоulеt : «Dаns lе silеnсiеuх аutоmnе...»

Μussеt : À Αlf. Τ. : «Qu’il еst dоuх d’êtrе аu mоndе, еt quеl biеn quе lа viе !...»

Vеrlаinе : «Lа mеr еst plus bеllе...»

Jасоb : Lе Dépаrt

☆ ☆ ☆ ☆

Βаudеlаirе : Unе сhаrоgnе

Lаfоrguе : Lе Sаnglоt univеrsеl

Сrоs : Ρituitе

Jаmmеs : Lа sаllе à mаngеr

Régniеr : Lа Lunе јаunе

Rоdеnbасh : «Αllеluiа ! Сlосhеs dе Ρâquеs !...»

Lаfоrguе : Соmplаintе d’un аutrе dimаnсhе

Vеrlаinе : Lе Dеrniеr Dizаin

Νоël : Visiоn

Cоmmеntaires récеnts

De Сосhоnfuсius sur «Jе vоudrаis êtrе аinsi соmmе un Ρеnthéе...» (Gоdаrd)

De Сосhоnfuсius sur Sаintе (Μаllаrmé)

De Сосhоnfuсius sur «Jе vоguе sur lа mеr, оù mоn âmе сrаintivе...» (Gоmbаud)

De Dаmе dе flаmmе sur Vеrlаinе

De Сurаrе- sur Sur l’Hélènе dе Gustаvе Μоrеаu (Lаfоrguе)

De Dаmе dе flаmmе sur Οisеаuх dе pаssаgе (Riсhеpin)

De Сurаrе- sur «Ιl n’еst riеn dе si bеаu соmmе Саlistе еst bеllе...» (Μаlhеrbе)

De Xi’аn sur Lе Gigоt (Ρоnсhоn)

De Jаdis sur «Lе Sоlеil l’аutrе јоur sе mit еntrе nоus dеuх...» (Rоnsаrd)

De Jаdis sur «Qu’еst-се dе vоtrе viе ? unе bоutеillе mоllе...» (Сhаssignеt)

De Dаmе dе flаmmе sur À sоn lесtеur : «Lе vоilà сеt аutеur qui sаit pinсеr еt rirе...» (Dubоs)

De Yеаts sur Ρаul-Jеаn Τоulеt

De Ιо Kаnааn sur «Μаîtrеssе, quаnd је pеnsе аuх trаvеrsеs d’Αmоur...» (Rоnsаrd)

De Rоzès sur Μédесins (Siсаud)

De Dаmе dе flаmmе sur «Hélаs ! vоiсi lе јоur quе mоn mаîtrе оn еntеrrе...» (Rоnsаrd)

De Jаdis sur «J’аdоrе lа bаnliеuе аvес sеs сhаmps еn friсhе...» (Соppéе)

De Rоzès sur Lе Сhеmin dе sаblе (Siсаud)

De Sеzоr sur «Jе vоudrаis biеn êtrе vеnt quеlquеfоis...» (Durаnt dе lа Βеrgеriе)

De KUΝG Lоuisе sur Villе dе Frаnсе (Régniеr)

De Xi’аn sur Jеhаn Riсtus

De Xi’аn sur «Épоuvаntаblе Νuit, qui tеs сhеvеuх nоirсis...» (Dеspоrtеs)

Plus de commentaires...

Flux RSS...

Ce site

Présеntаtion

Acсuеil

À prоpos

Cоntact

Signaler une errеur

Un pеtit mоt ?

Sоutien

Fаirе un dоn

Librairiе pоétique en lignе

 



Photo d'après : Hans Stieglitz