Ô ma belle rebelle,
Las, que tu m’es cruelle !
Ou quand d’une doux souris
Larron de mes esprits,
Ou quand d’une parole
Si mignardement molle,
Ou quand d’une regard d’yeux
Traîtrement gracieux,
Ou quand d’un petit geste
Non autre que céleste,
En amoureuse ardeur
Tu m’enflammes le cœur.
 
Ô ma belle rebelle,
Las, que tu m’es cruelle !
Quand la cuisante ardeur
Qui me brûle le cœur
Veut que je te demande
À sa brûlure grande
Un rafraîchissement
D’un baiser seulement.
 
Ô ma belle rebelle,
Que tu serais cruelle !
Si d’un petit baiser
Ne voulais l’apaiser,
Au lieu d’allègement
Accroissant mon tourment.
Me puissè-je un jour, dure !
Venger de cette injure ;
Mon petit maître Amour
Te puisse outrer un jour,
Et pour moi langoureuse,
Il te fasse amoureuse,
Comme il m’a langoureux
Pour toi fait amoureux.
Alors par ma vengeance
Tu auras connaissance
Que vaut d’un doux baiser
Un Amant refuser.
Et si je te le donne,
Ma gentille mignonne,
Quand plus fort le désir
En viendrait te saisir :
Lors après ma vengeance,
Tu auras connaissance
Quel bien fait, d’un baiser
L’Amant ne refuser.