Rodenbach

(1855-1898)

La Jeunesse blanche

(1886)

Ρrоlоguе

Choses de l’enfance +
Premier amour +
Soirs de province +
Les Jours mauvais ×
Mélancolie de l’Art +
 

Rodenbach

La Jeunesse blanche, 1886


Péché


 
 

I


 
Péché ! Tentation du soir ! Chairs profanées,
Lampe éteinte où ne brûle aucun reste de feu
Lèvres ne sachant plus les douceurs de l’aveu,
Et s’effeuillant pour tous comme des fleurs fanées.

Chambres de volupté, rouge et flambant décor
Dont les miroirs profonds redisent la féerie,
Alcôves où la chair lamentable et fleurie
Offre son plaisir rose et nu sur des fonds d’or.

Ô baume du péché ! courtisanes menteuses,
Muses des soirs mauvais, versant des élixirs
Qui sont des entremetteurs d’amour et de désirs
Et du champagne blond aux mousses chuchoteuses.

Douceur des seins s’offrant comme un coussin moelleux
Où reposer sa tête endolorie et pâle
Quand l’ivresse, à travers les vins couleur d’opale,
Fait surgir des lits d’or sous de grands rideaux bleux.

Et vers ces lits profonds, baignés d’odeur légère,
On marche, halluciné par des fantômes nus,
Et l’on va demandé, dans des bras inconnus,
La minute d’oubli d’une mort passagère !

Oh ! dormir ! oublier tout ce qui peut mentir !
Les lèvres et les yeux, amante ou fiancée !
Etouffer les coups d’ailes aux murs de sa pensée
Et clamer peu à peu la douleur de sentir.

C’est comme qui dirait une agonie heureuse !
On divague, on s’endort dans un énervement
Et les choses au loin flottent confusément
Dans l’aube du sommeil fragile et vaporeuse !

Et vaincu, tout un soir dans l’ombre, sans flambeau,
On enlace une chair que le spasme importune,
Triste comme les morts caressant sous la lune
L’ange de marbre blanc couché sur leur tombeau !
 
 
 

II


 
Mais quel retour navré dans le matin vermeil
Avec le grand dégoût d’une nuit de débauche,
Quand, parmi les rumeurs du plein jour qui s’ébauche,
L’âme aussi s’ensanglante aux flèches du soleil !

On va comme un voleur qui s’esquive et se sauve
Ne regardant personne et longeant les murs gris ;
On sent encor sur soi de la poudre de riz,
Et le reste obsédant des senteurs de l’alcôve.

Il semble que l’on épande un odeur de péchés !
Et dans le brouillard pâle où meurent les lanternes,
Les passants matineux plaquent des ombres ternes
Comme des remords noirs au cœur des débauchés.
 
Et dans l’éloignement, sous les lueurs accrues
Qui percent peu à peu l’horizon morne et lourd,
Les premiers omnibus avec un fracas sourd
Passent en cahotant le silence des rues.
 
Et machinalement, par un instinct secret,
On va vers les maisons des cruelles amantes
Dont les volets fermés ont des douceurs calmantes
Et la honte n’est plus qu’un douloureux regret.
 
On leur fait, sans les voir, des gestes de reproches
Avec l’espoir prochain d’un amour partagé
Tandis que tout là-bas, dans le ciel affligé,
S’adoucit par degrés la tristesse des cloches !
 

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