Rodenbach

(1855-1898)

La Jeunesse blanche

(1886)

Ρrоlоguе

Choses de l’enfance +
Premier amour +
Soirs de province ×
Les Jours mauvais +
Mélancolie de l’Art +
 

Rodenbach

La Jeunesse blanche, 1886


Béguinage flamand


 
                I
 
Au loin, le Béguinage avec ses clochers noirs,
Avec son rouge enclos, ses toits d’ardoises bleues
Reflétant tout le ciel comme de grands miroirs,
S’étend dans la verdure et la paix des banlieues.
 
Les pignons dentelés étagent leurs gradins
Par où monte le Rêve aux lointains qui brunissent,
Et des branches parfois, sur le mur des jardins,
Ont le geste très doux des prêtres qui bénissent.
 
En fines lettres d’or, chaque nom des couvents
Sur les portes s’enroule autour des banderoles,
Noms charmants chuchotés par la lèvre des vents :
La maison de l’Amour, la maison des Corolles.
 
Les fenêtres surtout sont comme des autels
Où fleurissent toujours des géraniums roses,
Qui mettent, combinant leurs couleurs de pastels,
Comme un rêve de fleurs dans les fenêtres closes.
 
Fenêtres des couvents ! attirantes le soir
Avec leurs rideaux blancs, voiles de mariées
Qu’on voudrait soulever dans un bruit d’encensoir
Pour goûter vos baisers, lèvres appariées !
 
Mais ces femmes sont là, le cœur pacifié,
La chair morte, cousant dans l’exil de leurs chambres ;
Elles n’aiment que toi, pâle Crucifié,
Et regardent le ciel par les trous de tes membres !
 
Oh ! silence heureux de l’ouvroir aux grands murs,
Où l’on entend à peine un bruit de banc qui bouge,
Tandis qu’elles sont là, suivant, de leurs yeux purs,
Le sable en ruisseaux blonds sur le pavement rouge.
 
Oh ! le bonheur muet des vierges s’assemblant !
Et comme si leurs mains étaient de candeur telle
Qu’elles ne peuvent plus manier que du blanc,
Elle brodent du linge ou font de la dentelle.
 
C’est un charme imprévu de leur dire « ma sœur »
Et de voir la pâleur de leur teint diaphane
Avec un pointillé de taches de rousseur
Comme un camélia d’un blanc mat qui se fane.
 
Rien d’impur n’a flétri leurs flancs immaculés,
Car la source de vie est enfermée en elles
Comme un vin rare et doux dans des vases scellés
Qui veulent, pour s’ouvrir, des lèvres éternelles !
 
 
 

II


 
Cependant, quand le soir douloureux est défunt,
La cloche lentement les appelle à complies
Comme si leur prière était le seul parfum
Qui pût consoler Dieu dans ses mélancolies !
 
Tout est doux, tout est calme au milieu de l’enclos ;
Aux offices du soir la cloche les exhorte,
Et chacune s’y rend, mains jointes, les yeux clos,
Avec des glissements de cygne dans l’eau morte.
 
Elles mettent un voile à longs plis ; le secret
De leur âme s’épanche à la lueur des cierges
Et quand passe un vieux prêtre en étole, on croirait
Voir le Seigneur marcher dans un jardin de Vierges !
 
 
 

III


 
Et l’élan de l’extase est si contagieux,
Et le cœur, à prier, si bien se tranquillise,
Que plus d’une, pendant les soirs religieux,
L’été répète encore les Ave de l’église.
 
Debout à sa fenêtre ouverte au vent joyeux
Plus d’une, sans ôter sa cornette et ses voiles,
Bien avant dans la nuit, égrène avec ses yeux
Le rosaire aux grains d’or des priantes étoiles.
 

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