Heredia

(1842-1905)

Les Trophées

(1893)

La Grèce et la Sicile +
Rome et les Barbares +
Le Moyen-Âge et la Renaissance +
L’Orient et les Tropiques +
La Nature et le Rêve +
Romancero ×

Lе Sеrrеmеnt dе mаins

Lа Rеvаnсhе dе Diеgо Lауnеz

Lе Τriоmphе du Сid

Les Conquérants de l’or +
 

Heredia

Les Trophées, 1893


La Revanche de Diego Laynez


 
Ce soir, seul au haut bout, car il n’a pas d’égaux,
Diego Laynez, plus pâle aux lueurs de la cire,
S’est assis pour souper avec ses hidalgos.
 
Ses fils, ses trois aînés, sont là ; mais le vieux sire
En son cœur angoissé songe au plus jeune. Hélas !
Il n’est point revenu. Le Comte a dû l’occire.
 
Le vin rit dans l’argent des brocs ; le coutelas
Dégainé, l’écuyer, ayant troussé sa manche,
Laisse échauffer le vin et refroidir les plats.
 
Car le maître et seigneur n’a pas dit : Que l’on tranche !
Depuis que dans sa chaise il est venu s’asseoir,
Deux longs ruisseaux de pleurs mouillent sa barbe blanche.
 
Et le grave écuyer se tient près du dressoir,
Devant la table vide et la foule béante,
Et nul, fils ou vassal, ne soupera ce soir.
 
Comme pour ne pas voir le spectre qui le hante,
Laynez ferme les yeux et baisse encor le front ;
Mais il voit son fils mort et sa honte vivante.
 
Il a perdu l’honneur, il a gardé l’affront ;
Et ses aïeux, de race irréprochable et forte,
Au jour du Jugement le lui reprocheront.
 
L’outrage l’accompagne et le mépris l’escorte.
De tout l’orgueil antique il ne lui reste rien.
Hélas ! hélas ! Son fils est mort, sa gloire est morte !
 
— Seigneur, ouvre les yeux. C’est moi. Regarde bien.
Cette table sans viande a trop piètre figure ;
Aujourd’hui j’ai chassé sans valet et sans chien ;
 
J’ai forcé ce ragot ; je t’en offre la hure ! —
Ruy dit, et tend le chef livide et hérissé
Qu’il tient empoigné par l’horrible chevelure.
 
Diego Laynez d’un bond sur ses pieds s’est dressé :
— Est-ce toi, Comte infâme ? Est-ce toi, tête exsangue,
Avec ce rire fixe et cet œil convulsé ?
 
Oui, c’est bien toi ! Tes dents mordent encor ta langue ;
Pour la dernière fois l’insolente a raillé,
Et le glaive a tranché le fil de sa harangue !
 
Sous le col d’un seul coup par Tizona taillé,
D’épais et noirs caillots pendent à chaque fibre ;
Le Vieux frotte sa joue avec le sang caillé.
 
D’une voix éclatante et dont la salle vibre,
Il s’écrie : — Ô Rodrigue, ô mon fils, cher vainqueur,
L’affront me fit esclave et ton bras me fait libre !
 
Et toi, visage affreux qui réjouis mon cœur,
Ma main va donc, au gré de ma haine indomptable,
Satisfaire sur toi ma gloire et ma rancœur ! —
 
Et souffletant alors la tête épouvantable :
— Vous avez vu, vous tous, il m’a rendu raison !
Ruy, sieds-toi sur mon siège au haut bout de la table.
 
Car qui porte un tel chef est Chef de ma maison. —
 

Commentaire (s)
Votre commentaire :
Nom : *
eMail : * *
Site Web :
Commentaire * :
pèRE des miséRablEs : *
* Information requise.   * Cette adresse ne sera pas publiée.
 


Mon florilège

(Tоuriste)

(Les textes et les auteurs que vous aurez notés apparaîtront dans cette zone.)

Compte lecteur

Se connecter

Créer un compte

Agora

Évаluations récеntes
☆ ☆ ☆ ☆ ☆

Jаmmеs : Lеs Dimаnсhеs

Ρrivаt d’Αnglеmоnt : À unе јеunе Sаltimbаnquе

Τоulеt : «Νаnе, аs-tu gаrdé sоuvеnir...»

Ρеllеrin : L’Αutоbus ivrе

Hаrаuсоurt : «Ιl plеut sur lа mеr, lеntеmеnt...»

Νuуsеmеnt : «Lа Νаturе а dоnné lеs соrnеs аuх Τаurеаuх...»

Du Βеllау : «Quiсоnquе, mоn Βаillеul, fаit lоnguеmеnt séјоur...»

Μussеt : Αu lесtеur dеs dеuх vоlumеs dе vеrs dе l’аutеur

Lе Vаvаssеur : Lеs Сhаts

Vеrlаinе : «Lеs pаssаgеs Сhоisеul аuх оdеurs dе јаdis...»

☆ ☆ ☆ ☆

Jаmmеs : Lеs Dimаnсhеs

Jаmmеs : Αvес lеs pistоlеts

Dеsbоrdеs-Vаlmоrе : Lоin du mоndе

Rimbаud : Jеunе ménаgе

Jаmmеs : Lа fеrmе étаit luisаntе

Μаеtеrlinсk : Rоndе d’еnnui

Αllаis : Lе Jеunе Hоmmе sаns sоin еt, dе plus, irrеspесtuеuх

Βаudеlаirе : Lе Vin dеs Сhiffоnniеrs

Cоmmеntaires récеnts

De Сurаrе- sur «Сеpеndаnt qu’аu pаlаis dе prосès tu dеvisеs...» (Du Βеllау)

De Сосhоnfuсius sur Αllégоriе : «Un très viеuх tеmplе аntiquе s’éсrоulаnt...» (Vеrlаinе)

De Сосhоnfuсius sur «J’аimе lе vеrt lаuriеr, dоnt l’hivеr ni lа glасе...» (Jоdеllе)

De Jаdis sur «Jе nе suis pоint се Diеu qui plеin dе fоllе rаgе...» (Νuуsеmеnt)

De Сосhоnfuсius sur Lа Rimе riсhе (Αutrаn)

De Jаdis sur Lеs Сhаts (Lе Vаvаssеur)

De Сurаrе_ sur Sоnnеt : «Quаnd је rеpоsеrаi dаns lа fоssе, trаnquillе...» (Gоudеаu)

De Сurаrе_ sur Lе Τоmbеаu dе Сhаrlеs Βаudеlаirе (Μаllаrmé)

De Jаdis sur «Lеs pаssаgеs Сhоisеul аuх оdеurs dе јаdis...» (Vеrlаinе)

De Vinсеnt sur Τоmbеаu du Ρоètе (Dеubеl)

De Xi’аn sur «Μоn âmе pаisiblе étаit pаrеillе аutrеfоis...» (Τоulеt)

De Lа Μusеrаntе sur Соntrе Ligurinus : «Τоut lе mоndе tе fuit...» (Dubоs)

De Vinсеnt sur «Un sоir, lе lоng dе l’еаu, еllе mаrсhаit pеnsivе...» (Durаnt dе lа Βеrgеriе)

De Xi’аn sur Lе Суgnе (Rеnаrd)

De Сurаrе- sur «Sаintе Τhérèsе vеut quе lа Ρаuvrеté sоit...» (Vеrlаinе)

De Ρоéliсiеr sur «Αmоurs јumеаuх, d’unе flаmmе јumеllе...» (Ρаssеrаt)

De Βеn sur «Μаrgоt, еn vоus pеignаnt, је vоus pinсе sаns rirе...» (Sigоgnе)

De Lеbrun sur «Jе rêvе, tаnt Ρаris m’еst pаrfоis un еnfеr...» (Соppéе)

De Rоzès sur Lе Сinémа (Siсаud)

De GΟUUΑUX sur «J’étаis à tоi pеut-êtrе аvаnt dе t’аvоir vu...» (Dеsbоrdеs-Vаlmоrе)

De Rоzès sur Répétitiоn (Vаuсаirе)

Plus de commentaires...

Flux RSS...

Ce site

Présеntаtion

Acсuеil

À prоpos

Cоntact

Signaler une errеur

Un pеtit mоt ?

Sоutien

Fаirе un dоn

Librairiе pоétique en lignе