Sur un trottoir désert du faubourg Saint-Germain,
Près d’un discret abbé qui lui donne la main,
Le marquis de douze ans vient de la messe basse :
En noir, en grand col blanc, timide et fier, il passe,
Mais chétif et pâli par un sang trop ancien ;
Et nul ne porte un nom plus fameux que le sien.
Il rentre, c’est le jour de sa leçon d’histoire ;
Et le prêtre médite une ruse oratoire
Pour dire au noble enfant en des termes adroits
Ce que fut son aïeul, mignon de Henri Trois.
On offre à l’éléphant, boulevard Saint-Germain,
Un grand bol de calva sur une table basse ;
Son existence entière en tels plaisirs se passe,
Ce pachyderme vit sans peur du lendemain.
Il se fait dorloter par ses frères humains,
Et, du soir au matin, ce sont bonheurs fugaces,
Le grand éléphant d’or jamais ne se tracasse,
En ce vieil animal bat le coeur d’un gamin.
«Comment te portes-tu, éléphant sans histoire ?
Réponds à ma question sans détours oratoires,
Car nous nous comprenons, nous sommes deux anciens.»
«Je ne vais pas répondre en des termes habiles,
Mais j’ai juste accepté que mon sort fût facile,
Donc, léger à subir, mais pas tant que le tien.»