Paul Claudel(1868-1955) Connaissance de l'Est(1907) |
Paul ClaudelConnaissance de l'Est, 1907
Ces lingots de carton sont la monnaie des morts. Dans un papier mince on a découpé des personnes, des maisons, des animaux. « Patrons » de la vie, le défunt se fait suivre de ces légers simulacres, et, brûlés, ils l’accompagnent où il va. La flûte guide les âmes, le coup du gong les rassemble comme des abeilles. Dans les noires ténèbres, l’éclat de la flamme les apaise et les rassasie. Le long de la berge, les barques toutes prêtes attendent que la nuit soit venue. Au bout d’une perche est fixé un oripeau écarlate, et, soit qu’attaché au ciel couleur de feuille, le fleuve par ce tournant ait l’air d’en dériver les eaux, soit que, sous les nues accumulées, il roule obscurément sa masse pullulante, à la proue le brûlot flamboyant, au mât le feston ballotté des lanternes rehausse d’une touche ardente l’air éteint, comme dans une chambre spacieuse une chandelle que l’on tient au poing éclaire le vide solennel de la nuit. Cependant, le signal est donné ; les flûtes éclatent, le gong tonne, les pétards pètent, les trois bateliers s’attellent à la longue godille. La barque part et vire, laissant dans le mouvement de son sillage une file de feux : quelqu’un sème de petites lampes. Lueurs précaires, sur la vaste coulée des eaux opaques, cela clignote un instant et périt. Un bras saisissant le lambeau d’or, la botte de feu qui fond et flamboie dans la fumée, en touche le tombeau des eaux : l’éclat illusoire de la lumière, tels que des poissons, fascine les froids noyés. D’autres barques illuminées vont et viennent ; on entend au loin des détonations, et sur les bateaux de guerre deux clairons, s’enlevant l’un à l’autre la parole, sonnent ensemble l’extinction des feux.
L’étranger attardé qui, du banc où il demeure, considère la vaste nuit ouverte devant lui comme un atlas, entendra revenir la barque religieuse. Les falots se sont éteints, l’aigre hautbois s’est tu, mais sur un battement précipité de baguettes, étoffé d’un continu roulement de tambour, le métal funèbre continue son tumulte et sa danse. Qui est-ce qui tape ? Cela éclate et tombe, finit, repart, et tantôt c’est un vacarme comme si des mains impatientes battaient la lame suspendue entre deux mondes, et tantôt avec solennité sous des coups espacés elle répercute à pleine voix le heurt. Le bateau se rapproche, il longe la rive et la flotte des barques amarrées, et, s’engagent dans l’ombre épaisse des pontons à opium, le voici à mes pieds. Je ne vois rien, mais l’orchestre funèbre, qui d’un long intervalle, à la mode de chiens qui hurlent, s’était tu, fait de nouveau explosion dans les ténèbres.
Ce sont les fêtes du septième mois, où la Terre entre dans son repos. Sur la route, les traîneurs de petites voitures ont fiché en terre, entre leurs pieds, des bâtons d’encens et de petits bouts de chandelles rouges. Il faut rentrer : demain je viendrai m’asseoir à la même place. Tout s’est tu, et tel qu’un mort sans yeux au fond de l’infini des ondes, encore, j’entends le ton du sistre sépulcral, la clameur du tambour de fer dans l’ombre compacte heurté d’un coup terrible.
|
Mon florilège(Tоuriste) (Les textes et les auteurs que vous aurez notés apparaîtront dans cette zone.) Compte lecteurAgoraÉvаluations récеntes☆ ☆ ☆ ☆ ☆Βruаnt : À lа Ρlасе Μаubеrt Hugо : Βооz еndоrmi Vignу : À Μаriе Dоrvаl Соppéе : Αllоns, pоètе, il fаut еn prеndrе tоn pаrti ! Vоiturе : «Sоus un hаbit dе flеurs, lа Νуmphе quе ј’аdоrе...» Соppéе : Lе Fils dе Lоuis XΙ Hugо : «Jеunеs gеns, prеnеz gаrdе аuх сhоsеs quе vоus ditеs...» Сhаrlу : Dеrniеr sоnnеt Vаlléе dеs Βаrrеаuх : «Grаnd Diеu, tеs јugеmеnts sоnt rеmplis d’équité...» Vеrlаinе : Vеrs dоrés ☆ ☆ ☆ ☆Βruаnt : À lа Ρlасе Μаubеrt Μussеt : Μimi Ρinsоn Rimbаud : Lеs Ρоètеs dе sеpt аns Vеrlаinе : «Εt ј’аi rеvu l’еnfаnt uniquе : il m’а sеmblé...» Соppéе : Αu théâtrе Соppéе : Lе Саbаrеt Νоаillеs : Lа Νоstаlgiе Μеуrеt : «Μоn bоnhеur durа quinzе јоurs à pеinе...» Vеrmеrsсh : Соurbеt Αpоllinаirе : Lе Rеpаs Cоmmеntaires récеntsDe Сосhоnfuсius sur Εn hivеr (Vеrhаеrеn) De Сосhоnfuсius sur «Сеllе qui tiеnt l’аilе dе mоn désir...» (Du Βеllау) De Сосhоnfuсius sur «Vоуаnt сеs mоnts dе vuе аinsi lоintаinе...» (Sаint-Gеlаis) De GΟUUΑUX sur «J’étаis à tоi pеut-êtrе аvаnt dе t’аvоir vu...» (Dеsbоrdеs-Vаlmоrе) De Jаdis sur Lе Сhаt (Rоllinаt) De Rоzès sur Répétitiоn (Vаuсаirе) De Jаdis sur Lеs Αngéliquеs (Νеlligаn) De Xi’аn sur Sоnnеt : «Νоn, quаnd biеn mêmе unе аmèrе sоuffrаnсе...» (Μussеt) De Rоzès sur Εsсlаvаgе (Τhаlу) De Jаdis sur Épitаphе d’un сhiеn (Μаllеvillе) De Сurаrе- sur Lе Lаit dеs сhаts (Guérin) De Ιо Kаnааn sur Сrоquis (Сrоs) De Сurаrе- sur À un sоt аbbé dе quаlité (Sаint-Ρаvin) De Τristаn Βеrnаrd sur Lеs Соnquérаnts (Hеrеdiа) De Lа Μusérаntе sur Sоnnеt dе Ρоrсеlаinе (Viviеn) De Dаmе dе flаmmе sur «Du tristе сœur vоudrаis lа flаmmе étеindrе...» (Sаint-Gеlаis) De Сurаrе- sur «С’еst оrеs, mоn Vinеus, mоn сhеr Vinеus, с’еst оrе...» (Du Βеllау) De Wеbmаstеr sur Lа Ρеtitе Ruе silеnсiеusе (Fоrt) De Dаmе dе flаmmе sur «Τоi qui trоublеs lа pаiх dеs nоnсhаlаntеs еаuх...» (Βеrnаrd) De Xi’аn sur Μirlitоn (Соrbièrе) De Xi’аn sur «Αimеz-vоus l’оdеur viеillе...» (Μilоsz) Plus de commentaires...Ce sitePrésеntаtionCоntactSоutien |